dimanche 27 mars 2011

Au fond du Vieux Jardin





Quand il ne restait plus, après la pluie, que quelques beaux nuages disséminés dans le ciel bleu, que c'était samedi ou dimanche et que je n'avais pas de cours- nous allions faire la lessive, te souviens-tu ?


Je mettais dans une grande bassine les draps, les taies d'oreillers et de coussins, nos sous vêtements et aussi une planche, un bâton et deux ou trois savons à l'aspect un peu minable mais efficaces, et je me mettais en route, la bassine sur la tête. Tu mettais dans ton sac à dos notre déjeuner ainsi qu'un réchaud. Tu me suivais , portant d'une main un grand seau en maillechort que nous empruntions à la maison d'en bas et de l'autre un sac contenant une canne à pêche pliée, une boîte de vers et un filet. (...)


Les cailloux succédaient à une plage de sable et au bord de l'eau, il y avait deux pierres semblables à des carapaces de tortue à demi enfouies assez grandes  pour que trois ou quatre personnes puissent s'accroupir dessus. Je posais la bassine à proximité et m'installais en retroussant ma jupe ; (...)


Je me mettais enfin à laver le linge et tu t'installais plus loin pour pêcher. Je lavais d'abord les petites choses, les mouillant, les frottant sur la planche avec du savon ; puis je pliais en deux les draps et les agitais dans l'eau. Je les savonnais en les pliant plusieurs fois et les battais fort en projetant des échos joyeux sur les champs alentour et jusque dans la vallée.

J'allumais le réchaud sur la plage de sable et je posais dessus le seau dans lequel je versais de l'eau de cendre avant d'y déposer le linge bien plié. Je dois être la dernière de ma génération à avoir utilisé cette méthode pour la lessive. C'était devenu trop facile avec une machine à laver... Pendant que le linge bouillait, je me reposais, assise au bord de l'eau, regardant les vairons se ruer sans crainte vers mes pieds et mes mollets et me chatouiller avec leurs lèvres pointues. 
J'arrachais une tige de prêle des champs ou de sétaire verte et en suçais l'extrémité blanche au goût légèrement sucré. Ou je cherchais des fraises à serpents ou des morelles noires. (...)


Après avoir cédé toute la bonne place au linge, nous nous installions  enfin pour déjeuner en déroulant une natte sur le sable. Une journée où il ne se passe rien est sans doute ce que l'homme peut rêver de mieux.


Hwang Sok-Yong, Le Vieux Jardin, Zulma




ça c'était hier et avant hier, je suis plongée dans le Vieux Jardin  avec un immense plaisir. J'ai vu le film il y a trois ans et j'ai le souvenir des émotions que cette histoire m'avait donné. Mais je croyais avoir tout oublié des détails et les retrouver dans le roman est un immense plaisir. En plus, le papier des éditions Zulma est  tellement agréable à toucher.


aujourd'hui, j'écoute  Dans l'atelier fantôme d'Hervé Guibert de Vincent Josse. J'offre à chacun de mes enfants une pièce du futur rainbow warrior et je vous encourage à en faire autant.  Je m'abonne à l'Impossible. Je remets en marche l'atelier des kataras. Et je retourne dans le Vieux jardin.







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