lundi 20 février 2012

Je vous salue dans le silence, acte II



Peu de temps après mon arrivée à Canala, j'ai commencé à peindre ces masques que j'ai appelé « katara », mot que j'ai emprunté à la langue xaracuu. J'ai ramassé ces restes de palmes au milieu des feux destinés à s'en débarrasser ou au pied des cocotiers, taillés par les hommes. Ce sont la forme et la taille de chaque palme qui me dicte le graphisme. En séchant, le masque se modifie encore après mon intervention, comme s'il continuait à vivre , il rétrécit ou s'élargit, se tord dans un sens ou dans l'autre. Ces kataras sont pour moi comme des mots que je n'arriverai pas à prononcer ou qu'on n'arriverait pas à entendre : une tentative pour communiquer avec mon environnement : naturel et humain. Des messages, des messagers.

Depuis trois ans, j'offre ces kataras à tous ceux qui leur témoignent de l'intérêt. Ils sont un objet de médiation, de communication, d'échange.
L'an dernier, au lycée agricole de Pouembout, j'ai pu passer une après midi à peindre des kataras avec les lycéens (sous la responsabilité de leur professeur Ledji Below) C'est à ces jeunes Calédoniens de toutes origines que je dédie cette installation.
J'ai choisi de présenter ma « collection » de kataras dans des valises. Depuis des années, je collectionne les malles et valises abandonnées, je les ai trouvées dans les rues des villes où j'ai vécu ou dans les brocantes. Certaines sont un héritage familial.

Je viens d'un pays qui en s'urbanisant et s'industrialisant s'est éloigné de la nature. Je suis celle qui pose ses valises et regarde ce monde nouveau qui l'entoure. Non pour le conquérir ou le détruire. Pour apprendre. Pour partager.

(la malle a été trouvée dans la rue, dans le quartier de Graça à Lisbonne, la petite valise a été achetée dans une brocante avenida da liberdade à Lisbonne, c'est une valise de vendeur de billets de tram, elle est marquée CARRIS, les valises vertes viennent de mes grands parents, elles ont servi de berceau à ma mère pendant ses voyages en train, selon la légende familiale, la grande valise en cuir vient d'Emmaus St Brieuc et la petite de chez Pascal, brocanteur à St Porchaire.)

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